Chicago’s Kitchen, retour critique
J’ai publié mes notes de partie du JDR solo "Chicago’s Kitchen" de Jérôme Mioso. Mais je veux aussi en profiter pour partager mon avis sur le jeu, ses forces et ses faiblesses.
Avant de continuer, je veux préciser que l’expérience a été intéressante, notamment en terme de game-design, mais n’a pas été très satisfaisante. C’est donc un peu déçu que j’écris ce compte rendu.
Paramètres
J’ai joué en 4 parties pour un total de 4 h environ. La fiction a duré 5 années et a mené vers une victoire ; cela représente 80 évènements.
Notes de parties
Outre les notes rédigées que j’ai postées par ailleurs, j’avais pris des notes sur mes ressentis pendant mon expérience, qui s’est étendue sur 4 séances, et que je remets ici, telles quelles.
- 28/09/2025 01 :41. Première partie : création des personnages et première année.
- Fin de la première partie :28/09/2025 03 :03. Intéressant, mais je n’arrive pas à me passionner suffisamment par la fiction pour romancer. Je vais continuer plus tard, et peut être que je serai plus inspiré par la suite.
- 29/09/2025 00 :57 : seconde partie
- Fin de la seconde partie : 29/09/2025 01 :36. 40 minutes Intéressantes mais pas passionnantes, la répétition s’installe. Et les évènements ne m’inspirent pas. D’un côté ça me donne envie de creuser les personnages, de rajouter des détails scabreux. De l’autre je vois que j’ai très peu d’agentivité, je ne peux que décorer des évènements, une sorte de jeux de l’oie narrativiste. Ca me rappelle quand j’essaie de romancer certains jeux de plateaux (Terraforming Mars ou Race for the galaxy). À certains titres ça me fait penser à une machine à saucisse
- 03/10/2025 15:58 : Troisième partie. Je reprends avec l’idée de terminer avec l’envie d’aller au bout pour l’avoir fait. Mais pas passionné par la fiction que je crée. Il manque quelque chose pour que les personnages m’accrochent je pense. Quelque chose de l’ordre d’un but secondaire, autre qu’avoir un restaurant qui marche.
- Finalement, je commence à fatiguer de lancer des dés et de tourner les pages, donc je décide de créer un générateur rapide pour m’éviter de trop faire de manipulation répétitive.
- 03/10/2025 17:25 : Reprise. Le générateur me permet de générer jusqu’à la 5e année. On verra bien.
- 03/10/2025 18:29 : Fin de la troisième partie. On a fait 2 années en une heure (vs 1h20 la première et 41 m la seconde). On y est presque. On a gagné un peu de temps avec le générateur mais pas tant.
- 04/10/2025 00 :40 : 4e partie
- 04/10/2025 01 :27 : Fin de la 4e partie, une année en 40 minutes. Comme prévu, victoire au bout de 5 ans.
Retours plus structuré
Les notes de parties montrent bien ce que j’ai vécu :
- La partie génération aléatoire d’évènements est amusante. Les premiers mois tournent bien. Ce n’est pas forcément le cadre qui me fait le plus fantasmer, mais je m’amuse à découvrir les embûches que le jeu met sur ma main.
- La partie génération aléatoire d’évènements est enfermant. Après quelques dizaines de jets, je prends conscience que j’ai aucun impact sur ces jets. Les évènements arrivent. Rien de ce que j’ai raconté comme histoire, rien de ce que j’ai fait comme choix pour mon restaurant, mon personnage ou mon équipe n’a d’impact sur ces jets, n’influe. D’une certaine manière je n’ai aucune influence sur la fiction. La SEULE décision que je peux prendre c’est la progression de mon personnage, une fois par an de progresser dans telle ou telle compétence. Et cela aura un impact sur la fiction à travers les résultats des jets pour surmonter les embuches. Mais c’est faible. Une décision une fois tous les 16 tests, qui va influer d’un +1 sur un jet de 2à12 qui interviendra une fois tous les 3 jets... ça fait un choix impactant tous les 32 lancés. C’est très faible. Impossible de plaider pour mon personnage dans ces circonstances. Je suis contraint à interpréter et à rendre intéressant par la rédaction des évènements que je ne contrôle pas. Ça tient plus de l’oracle que du jeu de rôle.
- La partie génération aléatoire d’évènements est répétitive. Après quelques centaines de jet, je commence à réaliser le temps que j’ai perdu à lancer les dés. Au moins deux par évènement, donc sur 5 ans de fiction, au moins 160 lancés. Avec à chaque fois des pages à tourner, des calculs à faire, des lignes à trouver. Je dois avouer qu’à la troisième partie, l’idée d’avoir à recommencer cette partie m’a découragé et j’ai préféré créer un générateur pour le faire à ma place, et pouvoir me consacrer à interpréter les résultats.
- Il m’a fallu 5 ans pour arriver au bout, 80 évènements et d’après moi, la plupart des parties doivent tourner autour de cela. Hors la table d’évènements contient 36 possibilités, ce qui signifie que chacune sortira en moyenne trois fois. Certaines se prêtent bien à la répétition, et peuvent être inspirantes, par exemple, le retour régulier de la Némésis du personnage. D’autres, en revanche, risquent de rendre le tout un peu ridicule, par exemple l’invasion de chats.
Conclusion
C’est mon premier jeu solo de ce type, donc difficile de se faire une idée.
Mon impression est qu’il s’agit davantage d’un générateur de contraintes pour une création narrative. Le manque d’agentivité fait que j’ai du mal à le catégoriser comme un JDR puisque ce que je viens y chercher c’est justement que mon personnage puisse prendre des décisions significatives, et surtout puisse être proactif.
Je le trouve donc décevant en tant que JDR, mais je le garde comme un générateur de contraintes narratives pour l’écriture d’un restaurant. Je garde aussi la documentation plutôt alléchante sur Chicago pour la prochaine fois qu’une de mes tables aura à explorer cette ville. Et qui sait, peut-être prendront-ils un café au « Netti Cafe » ?